Vrais ou faux

Billets de banque

Spécimen de billet de banque

Spécimen de billets transmis par le gouvernement d’Alger, parachutés sur “Virgule” et destinés au D.M.R. pour financer la Résistance dans la Région 4 (Toulouse).

Ces billets nommés "La Paix" ont été mis en circulation la première fois
(en France métropolitaine) le 25 janvier 1941, et seront retirés de la
circulation en juin 1945.
Des billets fabriqués par la Banque de France, appartenant à la Banque
de France, envoyés en Afrique en 1941 et conservés en Algérie par la
Banque de l’Algérie. Ils ont été saisis, de fin 1943 à juillet 1944 par les
Forces Françaises Libres (FFL) (ou "l'Armée d'Afrique") pour financer
leurs actions, et celles de la Résistance intérieure.
Plus d'info sur ce billet sur le site de la Banque de France.
Source : Banque de France, service du Patrimoine historique et des
Archives

Lorsque Bernard [Schlumberger] reçoit de l’argent venu du ciel – des billets fournis par la Banque de France à Alger pour les besoins de la Région 4 – il les donne en paquets à Guy [de Rouville] pour qu’il les garde en attendant. Nous en prélevons une somme fixe – 60 francs par maquisard et par jour, le reste je le recompte. Bernard me dit : “Ce n’est pas la peine de recompter”. Mais je recompte, c’est plus fort que moi, je ne suis pas fille de banquier pour rien !
Ensuite, on en cache un paquet en haut d’une armoire dans la maison de notre jardinier, un ancien de la guerre de 1914-1918. “Tous ces millions” donnent beaucoup de soucis à cet excellent homme. Pour partager les soucis, nous en dissimulons un autre paquet dans un double plafond au dessus de ma baignoire.
Les allemands se rendront plus vite que prévu. Au dessus de ma baignoire, longtemps après, on a retrouvé des billets de 500 F : flambants neufs… et périmés ! La Banque de France (à Paris) nous en a refusé l’échange, même au rabais ! Nous les avons distribués en souvenir à nos anciens du maquis.


Extraits d’un récit d’Odile de Rouville
Extrait de “Quelques notes à la plume, pour t’aider à comprendre”, par Odile de Rouville à une petite-fille

Distribués en souvenir aux anciens maquisards, lors du 10ème anniversaire organisé par l’Amicale, avec le coup de tampon rouge visible sur ce spécimen.

Après un parachutage en provenance d’Alger, on me confia un colis assez important à apporter au service de renseignements en pleine montagne. Pour votre gouverne, j’avais avec moi une arme, un révolver 7,65 en cas de besoin. Ce colis enveloppé dans une couverture était lourd et encombrant et je ne savais absolument pas ce que je transportais. Malgré ma jeunesse, j’avais chaud et je peinais quelque peu. Enfin quand je suis arrivé au but final et que j’avais remis en main propre ce paquet, on l’ouvrit devant moi et à ma grande satisfaction – vous ne devinerez jamais – c’était 5.000.000 de francs en billets de 500 F tout neufs. Pour un gosse que j’étais, c’était une somme considérable.

Rémy Nathan

Carte d’identité

Une lame de rasoir et de l’eau oxygénée sont nos premières armes contre le S.T.O. : on fausse les vraies cartes d’identité des jeunes en grattant et en changeant la date de naissance de ceux qui appartiennent aux classes convoquées.
Bientôt, notre outillage se perfectionne : nous faisons de vraies fausses cartes pour ceux qui doivent changer complètement d’identité ; on a de faux tampons, au nom de villes entièrement détruites pendant la guerre : pas de vérification possible. Ou encore on se fait prêter de vrais tampons par des mairies “résistantes”.
On agit toujours par personnes interposées pour que celà ne s’ébruite pas et pour ne pas courir le risque d’une dénonciation. Mais…
Un beau jour, un vieux paysan sonne à la porte de la maison du Garric :
– Monsieur, je viens vous voir pour une petite affaire.
– G.R. : De quoi s’agit-il ?
– Je voudrais que vous me fassiez une fausse carte pour mon fils.
– G.R. : Comment ? Qui vous a dit que je faisais des fausse cartes ?
– Et bé ! Tout le monde le dit !!!

Odile Paul-Roux
Fausse carte d’identité

Fausse carte d’identité d’un maquisard de Vabre, de son vrai nom Marc Schoenenberger.

Les points remarquables de cette fausse carte sont :

  • Le nom. Où comment Colibri, nom de totem scout de Marc Schoenenberger, est devenu son alias de résistant, puis son vrai-faux nom, avec juste un y.
  • La date de naissance qui fait de lui un mineur alors qu’il est majeur.
  • Le lieu de naissance : Lourdes, pour un protestant lorrain !

Les fausses cartes d’identité mentionnaient souvent des naissances dans des lieux où les registres d’état-civil avaient disparus.

Mais pas toujours.

Ainsi Emeric Goldberger, médecin hongrois et juif réfugié à St-Pierre de Trivisy (et qui devint maquisard ensuite), bénéficia grâce au maire Henry de Rouville d’une fausse carte d’identité disant qu’il était né à Paris (ci-dessous). Son épouse en eut deux, établies à 1 mois d’intervalle, où elle est née à Paris mais avec un nom de naissance différent (faux tous les 2), l’une disant qu’elle était établie à Nice, l’autre à Agde. Possible que la 1ère présentait des failles obligeant à la refaire !? Ce fut en tout cas sous le faux nom de la 2ème carte qu’à la naissance de leur fille, un vrai faux certificat de naissance fut établi sous leurs noms d’emprunt. L’acte de mariage qui précéda est lui aussi fait “à Agde” et la cohérence (faux noms, dates, lieux, professions, …) entre tous ces papiers est assurée.

Fausse carte d’identité d’un juif réfugié devenu maquisard.
Profession bûcheron, alors qu’il était médecin.
Collection privée Goldberger.

Certificat

Le chef de district du Ravitaillement Général, fonctionnaire “de Vichy”, joue le double-jeu : le certificat est codé de telle manière qu’il peut être présenté aux gendarmes “de Vichy”, à la “police du maquis” et même à un milicien méfiant.

Le petit scout dessinateur devenu pour l’occasion “Monsieur Colibry” (voir Carte d’identité ci-dessus) est adjoint aux services administratifs du C.F.L. 10.

RAVITAILLEMENT GÉNÉRAL
       du TARN                  Certificat 
  DISTRICT de VABRE
 
     Je soussigné Schmitt Albert Chef de District au Ravitaillement
Général à Vabre certifie que Mr Colibry accompagné de son chauffeur
exécute son voyage avec sa camionnette pour livrer de la viande
nécessaire au Ravitaillement des communes de St Pierre de Trivisy et
de Lacaze.
     Demande est faite à toutes les autorités de laisser circuler
librement Mr Colibry.
                                          Vabre le 28 Juil. 44 

Bon de solidarité

Les bons de solidarité sont détournés. Donnés aux chauffeurs des camions, ils servent de carte de reconnaissance entre les maquis des différents secteurs.

Rosalie. Ce n’est pas un nom de code, mais celui de notre camionnette “gazo-bois” 1500 kgs Renault, immatriculée 3408 XV 3 et portant ostensiblement sur son aile avant droite la mention (sans doute obligatoire) AID-TARN. Albert Julien (dit Churchill) était son chauffeur attitré. Il n’aimait pas son fusil, encombrant “Remington 1903” et ses deux cartouchières en toile. Le tout était allongé dans un filet au-dessus du pare-brise. Il préférait garder quelques grenades à portée de la main.
Mais avant de penser à les utiliser, il lui fallait songer à faire “les gaz” et à être assez patient pour que Rosalie, gaz assez riche, veuille bien démarrer. Un jour, alors qu’une colonne blindée allemande attaque un de nos dépôts à Vabre, Rosalie, à l’arrêt devant le garage où nous nous ravitaillons, n’est pas prête à partir. Avec son flegme habituel, Churchill met la ventilateur en route… Je suis seul avec lui et avec seulement ma STEN. Les allemands sont encore loin, mais j’ai l’impression que c’est nous qui sommes visés. J’ai beau presser Churchill de laisser tomber Rosalie pour partir à pied à l’abri, il persiste : “Allez, déconne pas” (peut-être même l’a-t-il répété à voix basse en “slang”. Mais Rosalie démarre et franchit le sommet de la côte où nous disparaissons en angle mort.

Guy Gaultier

La milice aussi

L’adversaire utilise aussi des fausses cartes.

L’adversaire utilise aussi des fausses cartes.
                        MISE EN GARDE POUR MAQUIS. -
                               -:-:-:-:-:-:-
Objet  : Fausses cartes de résistance fabriquées par la Milice.
Source : sûre.

       De fausses cartes d'un prétendu S.R. de l'A.S. ont été
fabriquées, il y a déjà quelques temps, par la milice et ont permis
paraît-il à certains miliciens, porteurs de l'une de ces cartes, de
s'introduire dans certains maquis.

       Les renseignements founis ensuite par ces faux patriotes ont
permis aux allemands de disperser ces maquis, en leur occasionnant des
pertes très sérieuses. Certains miliciens seraient encore porteurs de
ces cartes. Celle en question se présente de la façon suivante :

                                [dessin]

Elle a été trouvée sur [XXXXX] né le 2/8/1923 à l'Isle en Dodon.
Il habitait 3 rue Dalmatie à Toulouse et est un agent auxiliaire de la
Gestapo sous les ordres du Capitaine Schweitzer, spécialement chargé de
la recherche des juifs & des véhicules, non encore utilisés par les
particuliers.

Arrêté par le police française et relâché sur la demande des autorités
allemandes. Cette carte lui a été fournie par la milice pour contacter
les Maquis.